Société spirite de Paris. - Médium, madame Costel
Le panthéisme, ou l'incarnation de l'Esprit dans la matière, de l'idée
dans la forme, est le premier pas du paganisme vers la loi d'amour qui
fut révélée et prêchée par Jésus. L'antiquité, avide de jouissances,
éprise de la beauté extérieure, ne regardait guère au delà de ce qu'elle
voyait ; sensuelle, ardente, elle ignorait les mélancolies qui naissent
du doute inquiet et des tendresses refoulées ; elle craignait les dieux
dont elle plaçait l'image adoucie aux foyers de ses demeures ;
l'esclavage et la guerre la rongeaient au dedans, l'épuisaient au dehors
; en vain la nature sonore et magnifique conviait les hommes à
comprendre sa splendeur ; ils la redoutaient, ou l'adoraient à l'égal
des dieux. Les bois sacrés participaient de la terreur des oracles, et
nul mortel ne séparait le bienfait de leur solitude des idées
religieuses qui faisaient palpiter l'arbre et frémir la pierre.
Le panthéisme a deux faces sous lesquelles il convient de l'étudier.
D'abord, la séparation infinie de la nature divine, morcelée dans toutes
les parties de la création et se retrouvant dans les plus infimes
détails aussi bien que dans sa magnificence, c'est-à-dire une confusion
flagrante entre l'œuvre et l'ouvrier. En second lieu, l'assimilation de
l'humanité, ou plutôt son absorption dans la matière. Le panthéisme
antique incarnait les divinités ; le moderne panthéisme assimile l'homme
au règne animal et fait jaillir les molécules créatrices de l'ardente
fournaise où s'élabore la végétation, confondant ainsi les résultats
avec le principe.
Dieu est l'ordre, que la confusion humaine ne
saurait troubler ; tout vient à point : la sève aux arbres et la pensée
aux cerveaux ; aucune idée, fille du temps, n'est abandonnée au hasard ;
elle a sa filière, une étroite parenté qui lui donne sa raison d'être,
la relie au passé et l'engage dans l'avenir. L'histoire des croyances
religieuses est la preuve de cette vérité absolue ; pas une idolâtrie,
pas un système, pas un fanatisme qui n'ait eu sa puissante et impérieuse
raison d'exister ; tous avançaient vers la lumière, tous convergeaient
vers le même but, et tous viendront se confondre, comme les eaux des
fleuves lointains, dans la vaste et profonde mer de l'unité spirite.
Ainsi le panthéisme, précurseur du catholicisme, portait en lui le
germe de l'universalité de Dieu ; il inspirait aux hommes la fraternité
envers la nature, cette fraternité que Jésus devait leur enseigner à
pratiquer les uns envers les autres ; fraternité sacrée, affermie
aujourd'hui par le Spiritisme qui relie victorieusement les êtres
terrestres au monde spirituel.
Je vous le dis en vérité, la loi
d'amour déroule lentement et d'une façon continue ses spirales infinies
; c'est elle qui, dans les rites mystérieux des religions indiennes,
divinise l'animal, le sacrant par sa faiblesse et ses humbles services ;
c'est elle qui peuplait de dieux familiers les foyers purifiés ; c'est
elle qui, dans chacune des croyances diverses, fait épeler aux
générations un mot de l'alphabet divin ; mais il était réservé au seul
Jésus de proclamer l'idée universelle qui les résume toutes. Le Sauveur
annonça l'amour et le rendit plus fort que la mort ; il dit aux hommes :
« Aimez-vous les uns les autres ; aimez-vous dans la douleur, dans la
joie, dans l'opprobre ; aimez la nature, votre première initiatrice ;
aimez les animaux, vos humbles compagnons ; aimez ce qui commence, aimez
ce qui finit. »
Le Verbe de l'Éternel s'appelle amour, et il
embrasse, dans une inextinguible tendresse, la terre où vous passez et
les cieux où vous entrerez, purifiés et triomphants.
Lazare.