Le Médium et le Docteur Imbroglio.Accourez, approchez, docteur Imbroglio ;
Le guéridon va seul ; c'est patent, c'est tangible.
‑ Moi, voir !… Je veux prouver dans un in-folio
Que la chose n'est pas possible.
Nous ferons une remarque sur la qualification donnée à l'Esprit qui a
dicté les poésies dont nous avons parlé ci-dessus. Les Esprits sérieux
répudient avec raison la qualité d'Esprits frappeurs : ce titre ne
convient qu'à ceux qu'on pourrait appeler frappeurs de profession, aux
Esprits légers ou malveillants, qui se servent des coups pour s'amuser
ou tourmenter ; les choses sérieuses ne sont pas de leur ressort ; mais
la typtologie est un mode comme un autre pour les communications
intelligentes, et dont les Esprits les plus élevés peuvent se servir à
défaut d'autre moyen, quoiqu'ils préfèrent l'écriture, comme répondant
mieux à la rapidité de la pensée. Il est vrai de dire que, dans ce cas,
ce ne sont pas eux-mêmes qui frappent ; ils se bornent à transmettre
l'idée, et laissent l'exécution matérielle à des Esprits subalternes,
comme un statuaire laisse au praticien le soin de tailler le marbre.
La lettre suivante a été adressée par M. Jaubert à M. Sabô, de
Bordeaux ; nous sommes heureux de la reproduire comme preuve des liens
qui s'établissent entre les Spirites de diverses localités, et pour
l'édification des gens timorés.
« Monsieur,
Je suis
sensible à votre lettre. J'accepte avec bonheur le titre que me défère
la Société spirite de Bordeaux ; je l'accepte comme récompense de mes
faibles travaux, de mes convictions profondes, et, pourquoi ne pas tout
dire ? de mes amertumes passées. Encore aujourd'hui la foi nouvelle est
assez mal portée ; les savants s'insurgent, les ignorants les suivent,
le clergé crie au démon, et quelques convaincus gardent le silence. Dans
ce siècle de matérialisme, d'appétits grossiers, de guerres
fratricides, d'attachements aveugles, immodérés aux royaumes de ce
monde, Dieu intervient ; les morts parlent, nous encouragent, nous
entraînent ; voilà pourquoi chacun de nous doit, sans peur, inscrire son
nom sur le drapeau de la sainte cause. Nous sommes toujours les soldats
du Christ ; nous proclamons la grandeur, l'immortalité de l'âme, les
liens palpables qui rattachent les vivants aux morts ; nous prêchons
amour et charité ; qu'avons-nous à craindre des hommes ? Être faible,
c'est être coupable. Voilà pourquoi, monsieur, dans la mesure de mes
forces, j'ai accepté la tâche que Dieu et ma conscience m'imposent.
Encore une fois, merci de m'avoir admis parmi vous ; soyez mon
interprète auprès de tous nos frères de Bordeaux, et recevez pour vous
l'assurance de mes sentiments les plus affectueux.
J. Jaubert,
Vice-président du Tribunal civil.
Remarque.
‑ Le Spiritisme compte aujourd'hui d'assez nombreux adhérents dans les
rangs de la magistrature et du barreau, ainsi que parmi les
fonctionnaires publics ; mais tous n'osent pas encore braver la crainte
de l'opinion ; cette crainte, du reste, s'affaiblit chaque jour, et,
avant peu, les rieurs seront tout surpris d'avoir mis, sans façon, au
rang des fous tant d'hommes recommandables par leurs lumières et leur
position sociale.