Manifestations de Ménilmontant
« Un fait singulier se renouvelle fréquemment dans le quartier Ménilmontant, sans qu'on ait pu encore en expliquer la cause.
M. X…, fabricant de bronzes, habite un pavillon qui se trouve au fond
de la maison ; on y entre par le jardin. Les ateliers sont à gauche et
la salle à manger est à droite. Une sonnette est placée au-dessus de la
porte de la salle à manger ; naturellement, le cordon est à la porte du
jardin. L'allée est assez longue pour qu'une personne ayant sonné ne
puisse s'enfuir avant qu'on ne soit venu ouvrir.
Plusieurs fois
le contremaître, ayant entendu la sonnette, alla à la porte et ne vit
personne. On crut d'abord à une mystification ; mais on eut beau être
aux aguets et s'assurer qu'aucun fil conducteur n'aboutissait à la
sonnette, on ne put rien découvrir, et le manège continuait toujours. Un
jour même la sonnette s'agita pendant que M. et Mme X… se trouvaient
précisément au-dessous et qu'un apprenti était dans l'allée devant le
cordon. Ce fait s'est renouvelé trois fois dans la même soirée. Ajoutons
que parfois la sonnette s'agitait tout doucement, parfois d'une manière
très bruyante.
Depuis quelques jours, ce phénomène avait cessé, mais avant-hier au soir il s'est renouvelé avec plus de persistance.
Mme X… est une femme très pieuse ; c'est une croyance dans son pays
que les morts viennent réclamer les prières des parents. Elle pensa à
une tante défunte et crut avoir trouvé l'explication ; mais prières,
messes, neuvaines, rien n'y a fait ; la sonnette tinte toujours.
Un métallurgiste distingué, à qui le fait était raconté, pensait que
c'était un phénomène scientifique et qu'une certaine quantité d'eau
forte et de vitriol, qui se trouvait dans l'atelier, pouvait dégager une
force assez grande pour faire mouvoir le fil de fer ; mais ces
substances ayant été éloignées, le fait n'a pas cessé de se produire.
Nous ne chercherons pas à l'expliquer, c'est l'affaire des savants,
dit la Patrie, qui pourrait bien se tromper. Ces sortes de mystères
s'expliquent souvent à la fin sans que la science ait à y constater le
moindre phénomène encore inconnu. »